samedi 15 mars 2025
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CMA CGM prêt à dépenser 5 milliards d’euros pour racheter la branche logistique du groupe Bolloré

L’armateur CMA CGM s’apprête à croquer la branche logistique du groupe Bolloré. Le 18 avril, les deux géants du capitalisme français sont entrés en négociation exclusive, sur une base de cinq milliards d’euros.

Si les discussions aboutissent d’ici trois semaines, ce sera un nouveau coup de poker pour l’armateur. Un gros coup même. Il n’a jamais finalisé une acquisition de cette importance. Cette transaction sera une nouvelle étape dans la saga de CMA CGM, comme dans celle de Bolloré, deux sociétés qui ont pas mal de points communs.

Ce sont deux empires confrontés à des choix stratégiques pour protéger et développer leurs actifs. Ce sont aussi deux groupes familiaux soucieux de préserver l’avenir pour les générations suivantes, deux dynasties françaises qui se connaissent bien d’ailleurs. Rodolphe Saadé, le patron de CMA CGM qui a repris et développé l’affaire créée par son père dans les années 1980, a acheté à Bolloré la flotte de bateaux de Delmas, l’ancien concurrent du milliardaire breton sur le marché africain qu’il a réussi à absorber.

Un « big deal » qui profite déjà au groupe Bolloré

À la Bourse de Paris, sa valeur s’est envolée le 18 avril. Idem pour Vivendi, dont Bolloré est le principal actionnaire. L’an dernier, le conglomérat a réalisé une autre cession remarquée en vendant sa division logistique Afrique : une vingtaine de ports, pour un montant équivalent. C’est peut-être la fin d’un chapitre de l’histoire du groupe. Bolloré s’est intéressé à ce métier à partir de 1986. Avec tout ce cash, le groupe breton a les coudées franches pour investir davantage. En renforçant par exemple sa participation dans Vivendi dont il détient 30%.

Le très conservateur milliardaire breton aura alors la main sur tout un pan du paysage médiatique français, les télévisions Canal+, C8, CNews, des journaux iconiques comme Paris Match, le Journal du Dimanche et le numéro un français de l’édition Hachette. Une toute puissance qui suscite beaucoup d’inquiétudes dans les milieux des médias et de l’édition. Le groupe protéiforme est aussi présent dans l’énergie, la mobilité électrique ou la musique avec sa participation dans le groupe Universal.

Contrôler le transport

Du côté de CMA CGM, l’opération va lui permettre de consolider son offre dans le transport et la logistique. Ses résultats dans le fret sont excellents. L’an dernier, CMA CGM a réalisé plus de 23 milliards d’euros de bénéfice. Un record absolu pour le CAC 40, plus du double de la meilleure performance réalisée précédemment par Total. Mais l’embarcation est fragile. Ce profit hors norme a été alimenté par les cours stratosphériques du fret maritime.

Mais cette activité est très cyclique, la bonne fortune se retourne très vite. Le quatrième armateur mondial a donc besoin de s’appuyer sur une autre jambe – terrestre – pour mieux traverser les futures turbulences. Avec cette acquisition, il mettra ses finances à l’abri des tempêtes propres à son activité principale et il musclera sa proposition commerciale. L’objectif étant de contrôler le transport de bout en bout, jusqu’au client final.

Une activité hyper concurrentielle

C’est aussi le choix qu’a fait le numéro un mondial du fret, le Danois Maersk. CMA CGM est quatrième dans une activité hyper concurrentielle où l’on décroche très rapidement. Il s’est fait déloger de la troisième place du podium par le Chinois Cosco en 2018. Et c’est à partir de l’année suivante qu’il a massivement investi dans la logistique.

Le nouveau poids lourd du capitalisme français a réinvesti 90% de ses profits dans le développement de son groupe. Il a récemment racheté Gefco qui assure le transport ferroviaire des voitures, dans Colis privé qui assure la livraison jusqu’au client final, il a racheté des terminaux portuaires à Los Angeles, des entrepôts. Et il est aussi présent dans les airs, avec une participation dans Air France-KLM pour être présent dans le fret aérien.

M. B.