La Russie, l’Iran et la Turquie ont fait part samedi 30 novembre de leur préoccupation face à l’« évolution dangereuse de la situation en Syrie », après l’avancée des jihadistes et des rebelles syriens dans la prise de contrôle de la ville d’Alep, et des provinces d’Idleb et de Hama. Le président Bachar el-Assad a déclaré dans la soirée que son pays peut « vaincre les terroristes » après l’offensive rebelle.
La Russie a annoncé samedi 30 novembre avoir évoqué lors d’entretiens séparés avec l’Iran et la Turquie la situation « dangereuse » en Syrie, après la prise par les jihadistes et leurs alliés de la majeure partie de la ville d’Alep. La Russie et l’Iran sont les principaux alliés du régime de Bachar el-Assad, tandis que la Turquie est un soutien des factions rebelles.
Lors de l’appel téléphonique entre les chefs de la diplomatie russe et turque, Sergueï Lavrov et Hakan Fidan, « les deux parties ont exprimé leur vive inquiétude face à l’évolution dangereuse de la situation en Syrie, liée à l’escalade militaire dans les provinces d’Alep et d’Idleb », a indiqué le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué. Ils ont exprimé « la nécessité de coordonner une action commune pour stabiliser la situation en Syrie. »
Lors de l’appel entre Sergueï Lavrov et son homologue iranien Abbas Araghchi, les deux hommes ont cette fois « exprimé leur extrême préoccupation quant à l’escalade dangereuse de la situation en Syrie », le communiqué évoquant cette fois « l’offensive terroriste des groupes armés » dans les régions d’Alep et Idleb.
« Les ministres sont convenus de la nécessité d’intensifier les efforts conjoints visant à stabiliser la situation en Syrie », a indiqué Moscou dans le compte rendu de la conversation avec le ministre iranien.
Le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi se rendra dimanche 1ᵉʳ décembre en Syrie, a annoncé samedi son ministère. Abbas Araghchi se rendra ensuite en Turquie pour des « concertations sur les questions régionales, en particulier les récents développements », a ajouté dans un communiqué le ministère iranien des Affaires étrangères.
Avancée des jihadistes et des rebelles à Alep, prise de lieux stratégiques à Idleb et Hama
Après avoir investi Alep aux premières heures de l’aube, la coalition anti-Assad a pris dans la journée le contrôle de l’aéroport international de la deuxième ville de Syrie, au nord du pays. Un aéroport qui n’était jamais tombé aux mains des rebelles mêmes aux pires moments de la guerre.
Les jihadistes et leurs alliés ont occupé en quatre jours plus de 50 villes et localités stratégiques dans les provinces voisines d’Idleb et Hama, d’où l’armée syrienne s’est retirée sans combattre, a affirmé l’Observatoire syrien des droits de l’Homme.
L’Iran a affirmé samedi que des « éléments terroristes » avaient attaqué son consulat à Alep, dans le nord de la Syrie, lors d’une offensive rebelle dans la région. Dans un communiqué, Esmaeil Baghaei, porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, a « fermement condamné l’attaque » menée par « certains éléments armés terroristes » contre le consulat iranien, ajoutant que l’ensemble des membres du personnel étaient sains et saufs.
Ligne de défense au nord
Un vaste mouvement d’exode des habitants d’Alep et d’autres villes a été observé vers les régions contrôlées par le gouvernement, plus au sud. L’armée syrienne et son allié russe mènent des raids aériens et procèdent à des barrages d’artillerie pour couvrir leur retraite et ralentir l’avancée des jihadistes et des rebelles, qui utilisent des chars et des drones.
L’armée gouvernementale tente d’établir une ligne de défense au nord de la province centrale de Hama et continue d’envoyer des renforts. Mais ceux-ci arrivent lentement et en nombre insuffisant pour stopper la progression des jihadistes et des rebelles, et encore moins pour lancer une contre-attaque.
Le président syrien Bachar el-Assad a affirmé samedi soir que son pays était capable de « vaincre les terroristes ». « La Syrie continue de défendre sa stabilité et son intégrité territoriale face à tous les terroristes et leurs soutiens, et elle est capable, avec l’aide de ses alliés et amis, de les vaincre et de les éliminer, quelle que soit l’intensité de leurs attaques », a-t-il déclaré lors d’un appel téléphonique avec son homologue émirien, a indiqué la présidence dans un communiqué.
De son côté, le Premier ministre irakien Mohamed Chia al-Soudani a estimé que « la sécurité de la Syrie et sa stabilité sont liées à la sécurité nationale de l’Irak, et impactent la sécurité régionale dans son ensemble, ainsi que les efforts visant à établir la stabilité au Moyen-Orient », selon un communiqué de ses services.
La France appelle toutes les parties à « protéger les populations civiles » à Alep
« La France suit avec attention les développements militaires survenus à Alep », a indiqué dans un communiqué le ministère des Affaires étrangères. « Ces développements démontrent la nécessité, treize ans après le début de la guerre civile syrienne, de reprendre sans délai les réunions du comité constitutionnel syrien, pour parvenir enfin à une solution politique », a ajouté le quai d’Orsay.
Les jihadistes de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), dominé par l’ex-branche syrienne d’al-Qaïda, et des factions rebelles syriennes ont lancé mercredi une offensive contre les forces du régime dans les provinces voisines d’Idleb et d’Alep, prenant des dizaines de localités avant d’entrer vendredi à Alep, la deuxième ville de Syrie, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme.
Ces violences sont les premières de cette ampleur depuis plusieurs années en Syrie, où les hostilités avaient globalement cessé entre les belligérants, soutenus par différentes puissances régionales et internationales aux intérêts divergents dans cette guerre dévastatrice déclenchée en 2011.
Mohammed Bessaïah