En Algérie, neuf personnes ont été condamnées lundi 2 janvier à 10 ans de prison pour « contrebande et spéculation ». Il s’agit de sept Tunisiens et deux Algériens arrêtés dans la ville de Tébessa, à l’est de l’Algérie, pour contrebande de produits alimentaires. La gendarmerie avait saisi à bord d’un bus touristique « une quantité importante de denrées alimentaires subventionnées ». Une somme d’argent de 4 000 dinars avait également été saisie. Face à l’ampleur de ce phénomène de contrebande, l’Algérie et la Tunisie ont durci leurs lois.
Le phénomène du commerce parallèle entre la Tunisie et l’Algérie, mais aussi entre la Tunisie et la Libye, est un phénomène très répandu qui s’est aggravé, selon les économistes. Se lancer dans la contrebande est parfois la seule option pour de nombreux Tunisiens de l’ouest et du sud du pays, des zones délaissées (marginalisées) par l’État depuis des longues années.
Face à l’ampleur du phénomène et à la volonté de deux pays de lutter contre la spéculation, le président tunisien a décrété en mars dernier une loi punissant ce genre d’infractions de 10 ans de prison à la perpétuité. Une loi similaire existait déjà en Algérie.
Les frontières entre les deux pays s’étendent sur 350 km et il est très difficile de lutter contre ces trafics.
Les pénuries en Tunisie dues à la situation des finances publiques, selon les spécialistes
Depuis plusieurs mois, la Tunisie fait face à une pénurie accrue des denrées alimentaires, notamment le blé qu’elle importe d’Ukraine. Cette pénurie n’est pas uniquement due à la spéculation et la contrebande. Selon les spécialistes, elle est surtout due à la situation des finances publiques, les produits manquants étant essentiellement importés par l’État.
Hatem Nafti, essayiste et auteur de Tunisie, vers un populisme autoritaire, (édité chez Riveneuve en octobre 2022) reproche au président Kaïs Saïed de manquer de sincérité quand il accuse les spéculateurs et les contrebandiers d’être derrière la pénurie alimentaire. Une crise due, selon lui, à des raisons multiples et complexes.
« La première raison est la crise économique que connaît la Tunisie et la dégradation de la note souveraine, ce qui a fait que plusieurs de ses fournisseurs veulent être payés au comptant, qui a fait qu’à plusieurs reprises, on a vu des bateaux stationnés sur les côtes tunisiennes et qui refusaient d’accoster tant qu’ils ne sont pas payés. », affirme Hatem Nafti.
Un phénomène qui s’est développé « après la révolution de 2011 »
Quant au problème de la contrebande, Hatem Nafti explique : « C’est un problème qui a toujours existé, notamment dans les régions frontalières dans lesquelles les services publics ne sont pas très développés, donc ça fait des années qu’il y a un commerce parallèle, d’ailleurs aussi bien avec l’Algérie qu’avec la Libye. Le phénomène qui s’est développé après la révolution de 2011 parce qu’il y a eu un recul. »
M. B.