Le Premier ministre britannique Rishi Sunak était avec son homologue japonais Fumio Kishida, ce mercredi 11 janvier, à la Tour de Londres. Tous deux ont signé un « accord d’accès réciproque », autrement dit un rapprochement entre leurs armées, dans un contexte d’ambitions chinoises grandissantes dans la région.
Le traité signé ce mercredi, mal vu du côté de Pékin, confirme l’intérêt croissant du Royaume-Uni pour l’Asie-Pacifique, tout comme celui du Japon pour la recherche d’alliances renforcées face notamment à la Chine.
Aux côtés de Fumio Kishida, Rishi Sunak a vanté les relations « plus fortes que jamais » entre Tokyo et Londres. « Non seulement à travers le commerce et la sécurité, mais aussi nos valeurs. »
Et d’en vanter « la brillante démonstration l’année dernière », en référence au soutien à l’Ukraine face à l’invasion russe. « Ayons une discussion stratégique qui soit notre espoir », a rebondi M. Kishida.
Accès réciproque
Cet accord est le plus important en matière de défense entre les deux pays depuis 1902. Le Royaume-Uni devient ainsi le premier pays européen à disposer avec le Japon d’un accord d’accès réciproque.
Le texte permet aux armées britannique et japonaise de se déployer sur le territoire de l’autre, et plus généralement, il établit un cadre juridique pour leur coopération.
Tokyo avait déjà signé un accord similaire l’an dernier avec l’Australie. Ce renforcement d’alliance militaire intervient en effet dans un contexte de tensions avec la Chine, dont les ambitions régionales sont grandes.
« C’est effectivement un accord très important qui permet une collaboration très avancée des forces armées de deux pays différents qui peuvent débarquer sur le sol de l’autre en situation de conflit par exemple, et puis plus généralement, ça peut permettre aussi des exercices multilatéraux entre partenaires dans le domaine de la défense, et donc ça participe de la dissuasion que peuvent exercer ses partenaires dans la région », commente sur nos antennes Guibourg Delamotte, maître de conférence en sciences politiques à l’Inalco.
« Il y avait des exercices auparavant, entre le Japon et le Royaume-Uni, simplement, ils avaient lieu en mer, et donc ils ne pouvaient pas impliquer de débarquement des forces anglaises sur le sol japonais. Pour deux États qui travaillent ensemble, ça signifie que la coopération peut aller beaucoup plus loin que quand il y a simplement des exercices maritimes en haute mer. Ça signifie qu’on envisage une situation ou le Royaume-Uni prendrait part à une situation de conflit dans la région, donc aurait besoin de débarquer des forces au Japon, ou bien même participerait éventuellement à la défense du Japon. On envisage des scénarios de coopération beaucoup plus avancés que quand on est simplement dans une forme de diplomatie militaire ou navale, et que les marines proches mènent des exercices de très grande ampleur, mais qui néanmoins n’impliquent pas de débarquement. »
Frappes préemptives
En tournée dans plusieurs pays du G7, le Premier ministre nippon multiplie les rencontres stratégiques. Après la France, l’Italie, le Royaume-Uni et le Canada, M. Kishida sera reçu vendredi à la Maison Blanche.
Là encore, la presse américaine annonce un partenariat stratégique approfondi avec Tokyo, le plus important de Washington dans la région Indo-Pacifique avec, pour principal objectif, la dissuasion vis-à-vis de la Chine.
« De fait, la possibilité pour les Américains d’opérer depuis le sol japonais dans une logique régionale est admise depuis longtemps. En principe, le gouvernement japonais doit être consulté et donner son accord à l’utilisation des bases d’une manière ou d’une autre. Mais dans le cas d’un tir de missile, effectivement, il faut procéder très rapidement, donc ça signifie que vraisemblablement, ce qu’il va se passer, c’est que les États-Unis vont être autorisés à eux-mêmes opérer des frappes préemptives ou agir librement. En fait, on confirme que les États-Unis ont toute marge de manœuvre pour agir dans le cadre d’un conflit autour de Taïwan… »
M. B.