La décision était attendue avec appréhension depuis plusieurs semaines : Adidas France, filiale de la marque allemande aux trois bandes, vient de se résoudre à regrouper l’ensemble de ses services administratifs en un seul lieu, pour ne conserver que son siège parisien. La réorganisation devrait être effective d’ici à septembre 2024. L’équipementier aura alors vidé les locaux qu’il occupe depuis 2018 dans le quartier d’affaires flambant neuf « Archipel », au nord de Strasbourg. Adidas est pourtant lié au propriétaire des lieux (Groupama) par un bail de neuf ans. Quelque 140 salariés sont concernés par cette relocalisation, engagée à l’issue de deux ans de pandémie qui, il est vrai, ont vu fondre la présence des salariés dans les bureaux. Ils étaient encore 200 lors de l’inauguration des locaux, il y a quatre ans. Pour leur permettre de poursuivre leur carrière au sein d’Adidas, l’entreprise a prévu de faire preuve d’une « flexibilité inédite » en ayant recours jusqu’à 80 % au télétravail. Soit trois à huit jours par mois seulement sur site, selon le type de poste, le reste de l’activité se déroulant à domicile. La possibilité pour les salariés de disposer d’espaces de coworking dans la capitale alsacienne a cependant été rejetée par la direction. « On nous dit que ce regroupement doit permettre aux deux équipes de se rencontrer et créer une culture d’entreprise, mais j’ai du mal à comprendre comment celles-ci va pouvoir se mettre en œuvre alors qu’on autorise les salariés à avoir un fort pourcentage de télétravail. Comment vont faire les personnes qui décideront de ne pas poursuivre chez Adidas, à quelles conditions vont-elles pouvoir partir ? », indique Olivier Apell, délégué syndical SASA (Syndicat autonome des salariés d’Adidas). L’hypothèse d’un plan social n’est en effet pas à exclure. Elle met en colère les représentants des quatre collectivités locales concernées (ville de Strasbourg, Eurométropole, Collectivité européenne d’Alsace et Région Grand-Est), qui s’étaient mobilisées il y a quelques semaines pour convaincre le PDG du groupe, Kasper Rorsted, qu’Adidas « a toutes les raisons de choisir l’Alsace et Strasbourg ». « Cette décision rapide et brutale a été prise avec un manque de transparence et de concertation total », dénonce ainsi Pia Imbs, présidente de l’Eurométropole de Strasbourg. Adidas est présent en Alsace depuis 1959, lorsque le fondateur, Horst Dassler, a lancé sa filiale française dans la petite ville de Dettwiller, connue pour son savoir-faire dans la fabrication de chaussures, avant de bâtir son siège quelques kilomètres plus loin, à Landersheim. Le groupe employait alors jusqu’à 2 000 personnes dans la région, avant de délocaliser la totalité de sa production en Asie. Il ne disposera bientôt plus que d’un « magasin d’usine » et de quelques entrepôts.
p nathalie in Le Monde