vendredi 22 novembre 2024
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Cérémonie des Goya : le cinéma espagnol fait aussi son ménage #MeToo

La question des abus sexuels dans le monde du cinéma a marqué la cérémonie des Goya, la grand-messe du cinéma espagnol, célébrée samedi soir à Valladolid en Castille-et-Leon. Aussi bien les stars que les représentants de la sphère politique ont soutenu ce meetoo du ciné espagnol, alors que deux réalisateurs sont accusés d’avoir abusé de jeunes actrices. 

La cérémonie des Goya, grand-messe annuelle du cinéma espagnol, équivalent des César français, a consacré samedi le film Le Cercle des neiges, au moment où le secteur est secoué par les accusations de violences sexuelles à l’encontre d’une figure du cinéma indépendant.

Réalisé par Juan Antonio Bayona (Jurassic World: Fallen Kingdom, The Impossible), le long-métrage, qui a reçu le prix du meilleur film et du meilleur réalisateur, retrace l’odyssée des jeunes joueurs d’une équipe de rugby amateur uruguayenne, dont l’avion s’est écrasé dans la Cordillère des Andes en 1972 alors qu’ils se rendaient au Chili. La cérémonie, qui a également décerné le prix du meilleur film européen au film français Anatomie d’une chute et une récompense honorifique à l’actrice américaine Sigourney Weaver, a été marquée par le scandale sexuel qui touche l’Espagne.

« Cela suffit, ces abus ! »

Alors que sur le tapis rouge du grand théâtre de Valladolid défilaient les stars du ciné espagnol comme le réalisateur Pedro Almodovar ou son actrice fétiche Penelope Cruz, la question des violences machistes dans le secteur du cinéma a été au centre du débat. « Il est urgent que nous exigions tous des garanties d’égalité, et cela passe par la condamnation de tous les abus et de la violence sexuelle », a déclaré en ouverture l’actrice et chanteuse Ana Belén.

Parmi les cinéphiles qui ot foulé le tapis des stars, le chef du gouvernement espagnol, le socialiste Pedro Sanchez, qui a profité des projecteurs pour rappeler son combat contre « ce fléau de société » : « La violence contre les femmes est une violence structurelle. Je suis d’accord avec ce qu’ont dit les présentateurs de la cérémonie : ils veulent une industrie du cinéma saine, car ils veulent une société saine. En finir avec cette violence structurelle, incombe d’abord aux hommes. Il s’agit d’un engagement civil, de citoyen. »

La vice-présidente du gouvernement et ministre du Travail Yolanda Diaz, s’est montrée solidaire avec les actrices : « Je profite d’être là pour manifester ma solidarité avec toutes les femmes victimes et je vais le dire une fois de plus, dans notre pays, cela suffit ces abus ! Nous allons prendre toutes les mesures indispensables pour prévenir comme l’a dit le ministre de la Culture, pour accompagner et pour continuer à dénoncer les abus dans le cinéma et dans la culture de notre pays. »

Une figure du cinéma indépendant

Ce #MeToo du cinéma espagnol a éclaté fin janvier avec la publication d’une enquête du quotidien El Pais dans laquelle trois femmes accusaient le cinéaste Carlos Vermut de violences sexuelles. Figure du cinéma indépendant, Carlos Vermut, de son vrai nom Carlos López del Rey, a remporté en 2014 le prix le plus prestigieux du festival de Saint-Sébastien, rendez-vous majeur du cinéma hispanophone, pour son deuxième long-métrage, La Niña de fuego, encensé par la critique. Les accusations à son encontre ont provoqué une vague d’indignation en Espagne, pays en pointe dans la lutte contre les violences de genre. Vermut a affirmé dans El Pais ne pas être « conscient d’avoir exercé de la violence sexuelle sur une femme », mais a reconnu avoir « étranglé des personnes mais de manière consentie ».

Dans le sillage de cette affaire, un autre réalisateur espagnol, Armando Ravelo, a lui été accusé par une artiste de l’avoir « incitée » à avoir des relations sexuelles lorsqu’elle n’avait que 14 ans.

Le ministère de la Culture a annoncé la création d’une unité spécialisée dans la prise en charge des victimes de violences machistes dans le secteur culturel et en particulier dans le cinéma, où la parole commence tout juste à se libérer.

Depuis le début du mouvement #MeToo en 2017, des figures du monde du cinéma ont été accusées de violences sexuelles dans de nombreux pays, à l’instar en France de l’acteur Gérard Depardieu et, cette semaine, des cinéastes Benoît Jacquot et Jacques Doillon, contre lesquels l’actrice Judith Godrèche a porté plainte.

D. C.