dimanche 9 mars 2025
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Culture / Israël effacé de la carte : un livre pour enfants suscite l’indignation et la colère de plusieurs élus et organisation juives

Dans cet ouvrage vendu dans plusieurs enseignes, la Palestine remplace l’État hébreu. Des élus et des organisations juives réclament son retrait.

C’est un petit livre ludique aux couleurs vives et aux personnages souriants, destiné aux enfants. « C’est quoi Al-Quds ? », interroge la couverture cartonnée, citant l’un des noms arabes de Jérusalem. Mais à l’intérieur, Maîtresse Salima, censée répondre « avec sagesse » aux interrogations de ses élèves, leur montre une carte où l’État d’Israël a été remplacé par la Palestine… Mis en avant dans la sélection « Ramadan » de la Fnac et figurant sur de nombreux autres sites, l’ouvrage suscite la « colère » et l’«émotion » de plusieurs élus et organisations juives, qui réclament son retrait.

« À l’heure où nos frères palestiniens su- bissent un génocide, la jeunesse est encore plus curieuse sur ce sujet », peut-on lire sur le site de la librairie musulmane Al Bayyinah. Dans une vidéo, le libraire présente C’est quoi Al-Quds ?, qui fait partie d’une « série éducative pour
éveiller aux sciences religieuses » : « Il faut enfants comprennent quelle est l’histoire de la Palestine et la valeur de ces lieux pour les musulmans », souligne-t-il.

Députée (Ensemble pour la République) des Français établis hors de France, Caroline Yadan a « saisi le directeur général de Fnac Darty pour demander le retrait du livre de la vente ». « Alors que les actes antisémites ont explosé depuis le 7 octobre 2023, diffuser un tel ouvrage, qui alimente un discours antisioniste et délégitime un État démocratique reconnu par la communauté internationale, est grave et dangereux », s’insurge-t-elle.

Même indignation chez la présidente du Collectif du 7 octobre et maire adjointe (LR) du 17e arrondissement de Paris, Aurélie Assouline : « Loin d’être un ouvrage éducatif, « C’est quoi Al-Quds ? » promeut une lecture biaisée et radicale de l’histoire qui, sous couvert de pédagogie, nourrit des revendications politiques rejetant toute reconnaissance d’Israël et encourageant sa suppression », a-t-elle écrit à la Fnac et à l’enseigne Cultura. « La promotion d’une fête religieuse ne peut servir de prétexte à une propagande terroriste ! », s’est pour sa part insurgé le publicitaire Frank Tapiro, qui a découvert le livre à la Fnac.

Du côté des enseignes culturelles, il n’est pas question de retirer ce livre de la vente, puisqu’« il n’est pas interdit ». La Fnac, qui « propose à tous ses clients un large catalogue d’ouvrages dans le respect du cadre légal en vigueur », souligne que « la commercialisation d’un livre ne signifie pas une prise de position de (son) enseigne »

et reste « attachée à la liberté d’expression et à la diversité des opinions ». Chez Cultura, on précise que « le livre ne bénéficie d’aucune mise en avant particulière dans (leurs) magasins ou sur (leur) site internet, mais il reste disponible à la vente, dans la mesure où aucune décision de l’éditeur ou de la justice n’impose son retrait ».

Président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), Yonathan Arfi a également fait part de son « émotion » à la direction de la Fnac, « dans une période où la question du Proche-Orient a des impacts en France ». Mais il veut « pointer avant tout la responsabilité de la maison d’édition, déjà signalée il y a dix ans, qui produit des contenus pour le moins tendancieux et dangereux ». Lui aussi choqué par « cette falsification géographique et historique, particulièrement grave dans un ouvrage destiné à un jeune public », le Bureau national de vigilance contre l’antisémitisme (BNCVA) « se réserve le droit d’engager toutes actions judiciaires nécessaires pour mettre fin à la diffusion de ce type de contenu, qui contrevient à la loi et porte atteinte à la coexistence pacifique entre les peuples ».

Malgré nos relances, les éditions libanaises Albourak n’ont pas souhaité répondre à nos questions. Mais, après le reportage du Figaro, en juillet 2014, sur la présence, dans les rayonnages de Carrefour et de la Fnac notamment, d’ouvrages du même éditeur prônant le djihad, le ministère de l’Intérieur expliquait ne pas avoir « les moyens juridiques pour interdire de tels livres ». En ce qui concerne les ouvrages jeunesse, une commission de surveillance et de contrôle des publications destinées à l’enfance et à l’adolescence est chargée, sous l’égide du ministère de la Justice, de « vérifier que la publication ne comporte aucun contenu présentant un danger pour la jeunesse ». « Tenue de respecter le secret de ses travaux », elle ne peut évoquer ce cas précis. Mais indique que « le ministre de l’Intérieur est habilité à interdire de vendre à des mineurs les publications de toute nature présentant un danger pour la jeunesse ». ■

M. B.