mercredi 30 avril 2025
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Erdogan appelle la Turquie « à l’unité » après sa victoire à la présidentielle

La Turquie a vécu dimanche 28 mai une journée de vote inédite pour ce second tour de l’élection présidentielle, opposant Recep Tayyip Erdogan et le candidat de l’opposition, Kemal Kiliçdaroglu. Ce soir, le président a été déclaré vainqueur par la commission électorale avec 52,14% des voix.

Réactions à travers le monde :

La Suède espère une levée du veto turque pour son entrée dans l’Otan

Il y a un pays qui a scruté de près l’élection turque, c’est la Suède : sa candidature à l’Otan est bloquée par le président Recep Tayyip Erdoğan depuis plus d’un an. Elle espère que sa victoire aux présidentielles va permettre de relancer le processus, selon notre correspondante à Stockholm. Ce dernier est allé de mal en pis depuis que le nouveau gouvernement de droite est arrivé aux affaires cet automne.

Recep Tayyip Erdogan s’est montré intransigeant. Ses demandes d’extradition de militants kurdes notamment, ne pouvant pas être satisfaites par l’exécutif suédois puisque c’est la justice ici, qui statue au cas par cas. La Suède estime que l’élection étant passée, le président turc n’a peut-être plus autant besoin pour des raisons de politique intérieure, de manier le bâton sur ce dossier. Elle mise également beaucoup sur l’amendement de sa loi contre le terrorisme qui a été taillée pour Ankara, et qui entre en vigueur ce mercredi, le 1er juin.

Et puis, on espère, à demi-mots, que les États-Unis pourront désormais faire davantage pression pour que la Turquie lève son veto. Le secrétaire d’État américain Antony Blinken sera d’ailleurs en visite sur une base militaire du nord de la Suède ce lundi, et devrait réitérer la volonté américaine de voir la Suède rejoindre l’Alliance avant le prochain sommet de l’Otan qui aura lieu en juillet, à Vilnius en Lituanie.

Témoignage d’une pro-Kiliçdaroglu inquiète pour la Turquie

Au siège de l’opposition à Istanbul, Elif, une étudiante de 25 ans, confie ses craintes pour l’avenir du pays.

« On voit déjà le très mauvais état de l’économie, le problème des réfugiés et tant d’autres… J’ai beaucoup espéré que ça n’empire pas, mais il est désormais clair que tout va empirer. Pour moi, le pays risque de plonger. À tel point que j’envisage sérieusement de partir pour m’installer à l’étranger. Je suis malheureuse pour la Turquie. »

L’UE félicite Erdogan pour sa réélection

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le président du Conseil européen Charles Michel se sont « réjouis » dans des messages sur Twitter de « poursuivre le développement des relations entre l’UE et la Turquie ».

Recep Tayyip Erdogan appelle la Turquie « à l’unité et à la solidarité »

« Il est temps de mettre de côté les disputes de la campagne électorale et de parvenir à l’unité et à la solidarité autour des rêves de notre nation », a lancé le chef de l’État à la foule massée devant le palais présidentiel à Ankara.

Le président américain Joe Biden félicite Erdogan

Le président américain Joe Biden a félicité dimanche soir le président turc Recep Tayyip Erdogan pour sa réélection. « J’ai hâte de continuer à travailler ensemble en tant qu’alliés au sein de l’Otan sur des questions bilatérales et des défis mondiaux », a tweeté Joe Biden.

Le chancelier allemand Olaf Scholz félicite Erdogan pour sa réélection

Le chancelier allemand Olaf Scholz a félicité dimanche soir Recep Tayyip Erdogan pour sa réelection à la présidence turque, qualifiant la Turquie et l’Allemagne d’« alliés proches », dont « les peuples et les économies sont profondément liés ». « Félicitations au président Erdogan. Ensemble, nous voulons faire avancer notre agenda commun avec un nouvel élan », a écrit le chancelier Scholz sur Twitter.

L’AKP largement en tête en Allemagne 

La moitié de la diaspora turque vit en Allemagne. Une grosse communauté d’environ 3 millions de personnes. Et 67,36 (95% des votes dépouillés) des Turcs d’Allemagne ont voté au second tour pour Erdogan, c’est beaucoup plus qu’en Turquie. Plusieurs facteurs expliquent les succès de l’AKP et d’Erdogan auprès de cette population, analyse notre correspondante à Berlin.

Tout d’abord, les déficits de l’intégration à l’allemande. Ceux qui ont voté pour le président sortant ont souvent les mêmes arguments : Erdogan a redonné sa fierté à la Turquie, il défend bien les intérêts du pays et les intérêts des Turcs d’Allemagne pour lesquels Erdogan s’engage directement. Et ça marche surtout auprès des jeunes et de la seconde génération. Pour la troisième génération, des jeunes qui n’ont pas connu d’autre président en Turquie, confrontés fréquemment au racisme et aux discriminations en Allemagne où ils sont nés, voter Erdogan, c’est comme retrouver une forme de fierté, de dignité.

Il y a aussi des facteurs liés à la forte présente de l’AKP via ses organisations religieuses et culturelles. L’AKP dispose de relais beaucoup plus forts à l’étranger, notamment en Allemagne. Le relai des mosquées Ditib, directement gérées par Istanbul. Les organisations proches du pouvoir n’hésitent pas à louer des bus pour conduire les électeurs vers les bureaux de vote les plus proches.

De son côté, le CHP, le parti d’opposition qui n’a obtenu que 32,64% des voix des électeurs turcs d’Allemagne est lui beaucoup plus faible à l’étranger. Il n’a pas véritablement fait campagne en Allemagne.

Toutefois, il ne faudrait pas exagérer l’ampleur du raz de marée Erdogan chez les Turcs d’Allemagne. Car tous ne peuvent pas voter. Quantité des 3 millions de Turcs d’Allemagne -ceux que je connais notamment- n’ont pas la nationalité turque, ils ont dû y renoncer pour devenir allemands selon l’ancien code de la nationalité, et ils n’ont donc pas pu participer au vote. Souvent, il s’agit de personnes des communautés kurde et alévi, victimes de discriminations en Turquie où ils ne se sentent pas en sécurité, qui ne voient pas leur avenir ailleurs qu’en Allemagne et qui eux auraient plutôt voté pour l’opposition. Finalement, au premier tour, Erdogan a engrangé 750 000 votes en Allemagne. C’est finalement peu pour une communauté de trois millions.

Le président Zelensky espère un « renforcement » des liens entre Ukraine et Turquie

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a adressé ses félicitations, dans un tweet rédigé en turc : « Je félicite le président Erdogan pour sa victoire aux élections présidentielles. Nous espérons développer notre coopération pour la sécurité et la stabilité de l’Europe et renforcer davantage notre partenariat stratégique au profit de nos pays ».

L’ex-dirigeant du HDP, le principal parti de la gauche pro-kurde en Turquie, remercie « ceux qui se sont rendus aux urnes »

L’ex-candidat à la présidentielle de 2016, Selahattin Demirtas, remercie « ceux qui se sont rendus aux urnes pour voter, qui n’ont pas pu y aller même s’ils le voulaient, qui ont résisté et travaillé dur pour protéger les votes ». Il est emprisonné depuis 2016 après avoir été reconnu coupable de « terrorisme ».

Le président brésilien Lula souhaite « un bon mandat » à Erdogan 

Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a félicité dimanche son homologue turc Tayyip Erdogan pour sa réélection, lui souhaitant « un bon mandat avec beaucoup de travail » pour le peuple turc. Lula a écrit sur Twitter qu’Erdogan peut « compter sur le partenariat du Brésil dans la coopération mondiale pour la paix, dans la lutte contre la pauvreté et pour le développement du monde ».

Emmanuel Macron « félicite » Erdogan pour sa réélection et se projette sur les « défis à relever ensemble »

Emmanuel Macron a félicité Recep Tayyip Erdogan pour sa réélection à la présidence de la Turquie, estimant que « la France et la Turquie ont d’immenses défis à relever ensemble ». Parmi ces « défis », le président français cite, sur Twitter, le « retour de la paix en Europe, l’avenir de notre Alliance euro-atlantique, la mer Méditerranée ». « Avec le président Erdogan, que je félicite, nous continuerons à avancer », a ajouté le chef de l’État français.

Vladimir Poutine félicite Recep Tayyip Erdogan pour sa réélection

Le président russe Vladimir Poutine a félicité Recep Tayyip Erdogan pour sa réélection dimanche à la tête de la Turquie. « Votre victoire à ces élections est le résultat logique de votre travail dévoué à la tête de la République turque, preuve évidente du soutien du peuple turc à vos efforts pour renforcer la souveraineté de l’Etat et mener une politique étrangère indépendante », a indiqué Vladimir Poutine selon des déclarations publiées sur le site du Kremlin.

L’opposant Kiliçdaroglu se dit « triste face aux difficultés qui attendent » la Turquie

L’opposant turc Kemal Kiliçdaroglu, défait dimanche au second tour de l’élection présidentielle face au président sortant Recep Tayyip Erdogan, a exprimé dimanche soir sa « tristesse » pour l’avenir de la Turquie. « Je suis profondément triste face aux difficultés qui attendent le pays », a déclaré le candidat malheureux et chef du principal parti de l’opposition turque, qui s’exprimait depuis le siège de son parti à Ankara, après la victoire du président Erdogan. Kemal Kiliçdaroglu, qui estime que cette élection est la « plus injuste depuis des années », n’a pas contesté les résultats.

Profonde déception dans l’opposition

Dans le QG du parti de Kemal Kiliçdaroglu, le CHP, à Istanbul, c’est la désillusion. Les visages sont tendus. Les gens sont silencieux. Cela a été les montagnes russes pour eux puisqu’en début de soirée, l’une des deux agences turques, l’agence Anka donnait Kemal Kiliçdaroglu en tête sous un tonnerre d’applaudissements dans le QG. Les gens ont exulté, mais la joie est vite retombée et beaucoup de ceux qui sont venus suivre la soirée au QG sont déjà repartis.

Ceux qui sont restés se sont figés quand Recep Tayyip Erdogan est apparu à l’écran pour un premier discours de victoire que la chaîne d’opposition, qui défile en boucle dans le quartier général, a d’ailleurs coupé au bout de 5 minutes. Par moment des voitures conduites sans doute par des partisans de Erdogan passe sur la voie rapide juste devant le QG du CHP en klaxonnant à tout rompre, ce qui n’arrange sans doute pas le moral des partisans. « L’obscurité, c’est tout ce que je vois pour l’avenir », confie Serat, 32 ans, venu suivre la soirée au QG du CHP. « Ça fait trop longtemps que ça dure, se désole Ozgun, un de ses amis. J’ai l’impression que la moitié du pays ne vit pas la même réalité que nous ».

M. B.