vendredi 22 novembre 2024
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Europe / Énergies : Vladimir Poutine charge les Occidentaux et tend la main aux Turcs

Le président russe s’est à nouveau exprimé, mercredi 12 octobre, lors d’un forum consacré à l’énergie à Moscou. M. Poutine a accusé « certains hommes politiques occidentaux » de détruire l’économie mondiale de marché. En voulant plafonner le prix du pétrole russe, ils « menacent le bien-être de milliards de personnes ». Le chef d’État a par ailleurs affirmé que les fuites ayant touché les gazoducs Nord Stream relevaient du « terrorisme international ».

Les fuites ayant touché les gazoducs sous-marins Nord Stream, reliant la Russie à l’Allemagne, sont un « acte de terrorisme international », a déclaré ce mercredi Vladimir Poutine.

Il a ensuite désigné comme responsables ceux à qui, selon lui, l’incident profite, alors que la responsabilité de son pays n’est pas exclue, mais que des déclarations d’hostilité américaines notamment, anciennes ou récentes, vis-à-vis de ce système, ont refait surface depuis les explosions.

« Qui est derrière ce sabotage ? De toute évidence, quelqu’un qui veut enfin réussir à rompre de manière définitive les liens entre l’Union européenne et la Russie. Quelqu’un qui veut en finir avec l’autonomie de l’Europe, affaiblir son potentiel industriel, cela pour s’emparer du marché. Et bien sûr, quelqu’un qui est techniquement, je souligne, techniquement, capable d’organiser de telles explosions ; et qui a déjà eu recours à ce type de sabotage, et a été pris la main dans le sac, mais est resté impuni. Les bénéficiaires sont clairs. Car cet incident renforce l’importance géopolitique des systèmes de transport gaziers restants, celui qui traverse le territoire de la Pologne et de l’Ukraine, et qui a été construit à ses frais par la Russie. Il y a aussi les États-Unis, bien sûr, qui peuvent désormais fournir leur énergie à des prix élevés. »

Poutine interpelle les Européens

Selon M. Poutine, une partie du gazoduc Nord Stream 2, n’ayant jamais été mis en service à cause de la guerre en Ukraine, fonctionne toujours, même si les autres tubes du système Nord Stream ne seront réparés, précise-t-il, que dans le cas où leur exploitation serait garantie.

Le président russe assure ainsi que Moscou reste en capacité de livrer du gaz aux Européens via ce segment restant. « La Russie est prête à reprendre les livraisons », estime-t-il. « La balle est dans le camp de l’UE. Si elle le veut, elle n’a qu’à ouvrir le robinet. »

Et Vladimir Poutine de suggérer, sans entrer dans le détail, de faire à l’avenir transiter l’essentiel du gaz russe via la mer Noire. Nous pourrions, se contente-t-il de développer, « faire passer les principales voies de livraison de notre carburant et de notre gaz via la Turquie, en créant en Turquie le plus important hub de gaz ».

« Des Européens ordinaires souffrent. En un an, leurs factures d’électricité et de gaz ont plus que triplé. La population, comme au Moyen-Âge, a commencé à faire des réserves de bois pour se chauffer cet hiver. »

Dans son narratif, le chef de la Fédération de Russie a accusé le G7 et l’UE de « détruire » le marché mondial de l’énergie en voulant plafonner le prix du pétrole russe. À ses yeux, « certains hommes politiques occidentaux détruisent en réalité l’économie mondiale de marché » et « menacent le bien-être de milliards de personnes » avec ce projet.

« Imaginons que le fameux plafond sur les prix du pétrole soit introduit. Mais qui peut alors garantir que le même plafond ne sera pas fixé dans d’autres secteurs de l’économie – dans l’agriculture, dans la production de semi-conducteurs, d’engrais, de métallurgie ? Et pas seulement pour la Russie, mais aussi pour n’importe quel autre pays dans le monde. Plus personne ne donnera jamais de garanties. Avec leurs décisions aventureuses, certains politiciens occidentaux détruisent l’économie de marché mondiale, et en réalité, ils constituent une menace pour le bien-être de milliards de personnes. Les idéologues néolibéraux de l’Occident expérimentent déjà la destruction des valeurs traditionnelles. Maintenant, apparemment, ils entreprennent aussi de détruire la liberté d’entreprendre et l’initiative privée. »

Appel diplomatique lancé à la Turquie

Ce mercredi, le conseiller diplomatique du Kremlin, Iouri Ouchakov, a évoqué la rencontre entre Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan, prévue ce jeudi. Trois fois, ces trois derniers mois, les deux hommes se sont déjà rencontrés. Le président turc s’entretient également, régulièrement, avec son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.

Alors que la Turquie surveille tout particulièrement – du fait de sa présence en mer Noire, du fait aussi de la situation autour de la centrale nucléaire de Zaporijjia, de sa position de membre de l’Otan, et de sa dépendante aux gaz et pétrole russes – les évènements en Ukraine, le conseiller russe dit s’attendre à ce que le président turc fasse à Vladimir Poutine une proposition concrète de médiation sur le conflit.

« Erdogan va probablement officiellement proposer quelque chose », considère Iouri Ouchakov, disant s’attendre à une « discussion intéressante et utile ». « Les Turcs proposent leur médiation. Si des contacts (russo-ukrainiens) devaient avoir lieu, ils se feraient sur le territoire turc. »

Et de faire l’éloge de la position d’Ankara, qui « ne se joint pas par principe aux sanctions illégitimes occidentales » imposées à la Russie en raison de son offensive en Ukraine. Cela « donne une impulsion supplémentaire au renforcement de la coopération économique russo-turque », juge-t-il.

Ankara s’est efforcé, depuis l’offensive russe du 24 février, d’entretenir sa relation avec Kiev et Moscou, en jouant un rôle dans un échange de prisonniers en septembre entre la Russie et l’Ukraine, ou encore en favorisant sous l’égide de l’ONU, en juillet, un accord entre les deux pays permettant l’exportation de céréales ukrainiennes via la mer Noire et le Bosphore.

À deux reprises, la Turquie a aussi réuni en mars sur son sol des représentants russes et ukrainiens pour des négociations qui ont finalement débouché sur un dialogue de sourds.

M. B.