Alors qu’Emmanuel Macron mène une visite en Afrique de l’Est après avoir passé 24 h à Mayotte, ravagée par le cyclone Chido, une série d’articles du journal Le Monde sème l’émoi en France. Les journalistes du quotidien du soir y rapportent des propos perçus comme racistes, homophobes et misogynes qu’aurait tenus le président français. L’Élysée dément formellement, mais l’épisode tombe mal dans un contexte politique, national et international, tendu.
L’échange rapporté par Le Monde remonte à l’automne 2023. À l’époque, la loi immigration, source de fortes tensions au sein du camp présidentiel, se dessine. Le quotidien évoque une conversation entre Emmanuel Macron, son secrétaire général Alexis Kohler et le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau. Ce dernier allait démissionner quelques semaines plus tard, notamment en raison de l’adoption de cette loi soutenue par l’extrême droite.
Alors que les trois hommes évoquent la question de l’Aide médicale d’État (AME), dont le Rassemblement national réclame la suppression, Emmanuel Macron aurait alors estimé que : « Le problème des urgences dans ce pays, c’est que c’est rempli de Mamadou. » Surnom générique donné par le chef de l’État aux bénéficiaires de l’AME, dispositif visant les étrangers en situation irrégulière.
Des propos jugés « racistes », « une honte absolue », « une insulte à la République », a immédiatement dénoncé Manuel Bompard, coordinateur de La France Insoumise. Marine Tondelier, cheffe des Écologistes, a réagi à une autre révélation du quotidien français Le Monde. Emmanuel Macron aurait qualifié cette dernière et Lucie Castets, ex-candidate NFP au poste de Première ministre, de « cocottes ». Du sexisme pur et simple selon la responsable politique qui sur les réseaux sociaux cingle : « Emmanuel Macron prétend que la France ne veut plus d’écologie ni d’immigrés. Ce que j’ai surtout retenu des élections, c’est qu’ils ne voulaient plus de lui. »
Autres propos polémiques attribués au chef de l’État, des saillies considérées comme homophobes, concernant notamment son ancien Premier ministre Gabriel Attal et ses conseillers, décrits comme « la cage aux folles ».
Colère évidemment à l’Élysée, où l’entourage d’Emmanuel Macron, cité par l’Agence France Presse « dément fermement ces propos rapportés qui n’ont fait l’objet d’aucune vérification auprès de la présidence avant publication. » Le Monde maintient quant à lui ses informations.
Un contexte national et international tendu
Au-delà des réactions politiques à ces articles, ceux-ci interviennent par ailleurs dans un contexte délicat pour Emmanuel Macron. Le président de la République vient de passer 24 h à Mayotte, ravagée par le cyclone Chido. Le bilan humain de la catastrophe s’annonce très lourd dans le département français le plus pauvre de France et majoritairement habité par des citoyens noirs et musulmans.
La défiance y est forte vis-à-vis du chef de l’État, confronté jeudi 19 décembre à des manifestations de colère, traversées d’appels à la démission. En 2017, lors de son premier voyage présidentiel à Mayotte, il avait déjà plaisanté sur les « kwassa-kwassa », pirogues traditionnelles, qui selon lui servaient surtout aux périlleux voyage de migrants venus des Comores voisines.
Le président doit également enchaîner avec un déplacement à Djibouti et en Éthiopie ces prochaines 48 h et fait face à des pressions accrues venant du Tchad et du Sénégal sur la présence militaire française. Ces propos supposés ne devraient guère améliorer les relations entre la France, son département ultramarin endeuillé et le continent africain, en attendant les deux prochains articles du Monde qui doivent sortir dans les prochains jours.
A. D.