jeudi 17 octobre 2024
Accueil > A la UNE > Inde et Chine, les deux géants asiatiques entre rivalités et interdépendances

Inde et Chine, les deux géants asiatiques entre rivalités et interdépendances

Alors que s’ouvre le XXe congrès du Parti Communiste Chinois (PCC), retour sur la relation entre les deux géants asiatiques que sont l’Inde et la Chine. Une relation d’interdépendance entaillée de conflits militaires et de rivalités commerciale et diplomatique.

Même si les deux pays ont été portés par la décolonisation et ont pu se revendiquer non alignés, leur relation est depuis longtemps conflictuelle. Dès l’indépendance en 1947, l’Inde et la Chine ne parviennent pas à se mettre d’accord sur leurs frontières dans l’Himalaya. Cela va aboutir, en 1962, a une guerre et des milliers de morts pour le contrôle de l’Aksai Chin, une région de l’État indien de l’Arunachal Pradesh que la Chine considère comme sienne. Quelques années auparavant, l’Inde avait laissé la Chine envahir le Tibet, mais décidé d’accueillir des réfugiés et le gouvernement en exil du Dalaï Lama, une politique qui est toujours d’actualité et provoque la colère de Pékin.

Depuis l’arrivée au pouvoir de Narendra Modi, plusieurs affrontements ont eu lieu, notamment dans la vallée glaciale disputée de Galwan en 2020, ou un accrochage a provoqué la mort de dizaines de soldats. La situation frontalière reste extrêmement tendue avec des forces en alerte des deux côtés. L’Inde accuse la Chine de construire des infrastructures illégales dans l’Arunachal Pradesh. Enfin, l’Inde est aussi membre de l’alliance Indopacifique, aux côtés des États-Unis, ce qui l’oppose de facto et militairement à la Chine sur l’épineux dossier de Taïwan.

 Interdépendance importante

La rivalité se joue aussi sur le plan commercial, car aucune des deux puissances nucléaires ne souhaite s’engager dans une guerre. C’est ainsi que Narendra Modi a déplacé le conflit en bannissant de nombreuses applications chinoises, dont la très populaire TikTok, après les escarmouches de 2020. Depuis sa réélection en 2019, le Premier ministre a placé son mandat sous le signe de l’autosuffisance de l’Inde. Un slogan qu’il martèle d’autant plus fort que l’Inde est très largement dépendante de la Chine, notamment pour les équipements électriques et électroniques, les matières premières et les fertilisants.

En réalité, le déficit commercial entre les deux pays s’est même accru récemment. Les dernières estimations montrent que l’Inde importe pour 77 milliards d’euros de biens et services de plus qu’elle n’exporte en Chine. Alors derrière les déclarations belliqueuses, chacun sait bien qu’il a besoin de l’autre, l’Inde en premier chef.

Échanges diplomatiques réguliers

D’ailleurs, les échanges entre Narendra Modi, l’homme fort de l’Inde, et Xi Jinping, l’homme fort de Pékin sont un peu moins froids que ce que les coups d’éclats politiques et les accusations par médias interposés ne le laissent penser. En 2019 encore, Xi Jinping a effectué une fastueuse visite d’État en Inde. En 2021, il a participé, virtuellement, au sommet des BRICS organisé à New Delhi. Les diplomates échangent régulièrement sur les conflits frontaliers et les questions commerciales, pas plus tard que mardi 11 octobre. Avec la réélection annoncée de Xi Jinping, on ne se fait guère cependant d’illusion en Inde sur un changement de position de Pékin.

Reste que la donne a changé depuis la guerre en Ukraine. L’Inde, qui refuse de s’opposer à la Russie, partenaire militaire historique, se retrouve à s’abstenir aux côtés des Chinois lors du vote des résolutions à l’ONU. Pour ne pas se retrouver isolée, la Chine a intérêt à ce que l’Inde maintienne cette neutralité. Elle pourrait donc faire des gestes d’ouverture, reste à savoir lesquels.

M. B.