Les Australiens ont rejeté ce samedi une réforme qui aurait donné une reconnaissance aux populations autochtones dans la Constitution et leur aurait accordé de plus grands droits, a déclaré le vice-Premier ministre Richard Marles.
Les Aborigènes d’Australie n’auront pas leur « voix » au Parlement. Après le comptage des bulletins des trois quarts des bureaux de vote du pays, il ressortait que 55% des électeurs ont voté « non », samedi 14 octobre, au texte qui proposait de reconnaître dans la Constitution les Aborigènes comme les premiers habitants de l’île-continent et de leur donner une « voix » spécifique.
Le projet prévoyait en effet de créer un conseil consultatif auprès du Parlement et du gouvernement. Surnommé « La Voix », il pourrait émettre des avis sur les lois et les politiques publiques qui affectent les populations autochtones, Aborigènes et insulaires du détroit de Torres, qui représentent 984 000 personnes, soit 3,8% de la population australienne.
Le vote était obligatoire pour les 17,5 millions d’électeurs australiens. Pour être adoptée, la réforme devait recueillir non seulement une majorité de vote au niveau national, mais aussi dans au moins quatre des six États du pays. Elle n’a obtenu ni l’un ni l’autre.
Campagne agressive
D’abord largement majoritaire, le camp favorable au changement de la Constitution de 1901 n’a cessé de perdre du terrain ces derniers mois, en raison notamment de la campagne menée par l’opposition conservatrice, dirigée par l’ancien ministre de la Défense Peter Dutton. Pour le camp conservateur, la réforme constitue un bricolage constitutionnel et créerait des divisions au sein de la société, en créant une distinction de citoyenneté.
La campagne a entraîné une avalanche de commentaires racistes sur les médias en ligne. De fausses informations ont aussi circulé, dont certaines affirmaient que les titres de propriété pourraient être remis en cause ou que des réparations devraient être versées si la réforme passait.
Discriminations persistantes
Pour les partisans de « La Voix », cette réforme devait contribuer à panser les plaies encore vives d’un passé de colonisation et de répression raciale. Aujourd’hui, plus de 200 ans après la colonisation britannique, les Australiens autochtones, dont les ancêtres vivent sur le continent depuis au moins 60 000 ans, ont les mêmes droits que les autres citoyens, mais ils souffrent toujours de fortes inégalités.
Le Premier ministre de centre-gauche, Anthony Albanese, qui s’était beaucoup impliqué dans la campagne, avait lancé samedi un dernier appel aux électeurs. « Il s’agit du respect des indigènes australiens. Il s’agit de la façon dont nous nous voyons en tant que nation, mais aussi de la façon dont le monde nous voit », avait-il plaidé. Il n’a donc pas été entendu.
B. M.