La réunion du Conseil de sécurité de l’ONU a tourné au clash diplomatique, mardi 18 octobre, lorsque le ministre des Affaires étrangères malien Abdoulaye Diop et l’ambassadeur français se sont affrontés. Après que Bamako a lancé de nombreuses piques en direction de l’ONU au sujet du rapport du secrétaire général pour la période juin-septembre, Abdoulaye Diop a renouvelé les accusations portées contre Paris.
Après un début de séance dans son ronronnement habituel, la salle du Conseil de sécurité a pris des airs de ring de boxe dès que le ministre des Affaires étrangères malien a pris la parole, rapporte notre correspondante à New York.
Abdoulaye Diop a critiqué l’ONU et les membres du Conseil de sécurité mettant en garde les autorités de transition. Puis il a directement attaqué la France, qui a commis des actes « graves d’agression et d’espionnage » au Mali, selon lui, et a reproché au Conseil de ne pas réagir aux protestations successives de Bamako.
Au cours de sa prise de parole, Abdoulaye Diop s’est déclaré surpris que le rapport du secrétaire général « ait passé sous silence » la saisine du Conseil par le Mali le 15 août dernier pour « des tentatives de déstabilisation et des violations répétées de l’espace aérien du Mali par les forces françaises ». Soit « des actes d’agression d’une extrême gravité », dit-il, qui ne doivent pas rester sans suite.
Le Mali demande une réunion spécifique du Conseil de sécurité
Par sa voix, les autorités du Mali ont renouvelé leur demande d’une réunion spécifique du Conseil de sécurité de l’ONU pour présenter « des preuves concrètes ». Le ministre malien des Affaires étrangères affirme que la France a partagé des renseignements et laissé du matériel au profit d’organisations criminelles.
L’ambassadeur français, Nicolas de Rivière, s’est alors indigné de ces « mensonges » et diffamations, demandant à répondre pour « rétablir la vérité » : « Accusations mensongères et diffamatoires. Accusations graves et infondées. La France n’a jamais violé l’espace aérien malien. » « Je conteste formellement toute violation du cadre juridique bilatéral », a martelé le diplomate.
Nicolas de Rivière a rappelé les circonstances du déploiement de la force Barkhane, sa mission -rappelant que durant neuf années, la force Barkhane avait été déployée à la demande du gouvernement malien.
Bamako s’est gardé d’envoyer en amont les « preuves » évoquées
Alors que l’ambassadeur gabonais, assurant la présidence tournante du Conseil de sécurité de l’ONU, s’apprêtait à clore la réunion, Abdoulaye Diop a redemandé la parole.
Après un moment de flottement, la parole lui est donnée. Le ministre malien, cette fois sans aucune note devant lui, réitère sa demande d’une session spécifique « dans les plus brefs délais ».
« L’État malien amènera à la face du Conseil de sécurité et à la face du monde des preuves tangibles de ce que nous mettons en avant », déclare-t-il, avant de conclure qu’il souhaite que la France porte cette demande de réunion spéciale.
Une demande théâtrale qui a surpris les diplomates à New York, même la Russie, la plus fidèle allié des autorités de transition n’a pas demandé de « réunion spéciale » : rien n’empêchait Abdoulaye Diop d’avancer déjà ces éléments à cette présente séance. Le ministre aurait même pu les envoyer par courrier au Conseil en amont de cette séance s’il l’avait souhaité, ce qu’il n’a pas fait.
M. B.