La Commission européenne a annoncé ce vendredi 19 juillet qu’elle imposerait des tarifs jusqu’à 36,4 % plus élevés sur les importations de biodiesel en provenance de Chine. Une mesure anti dumping pour rééquilibrer le marché car ces biodiésels chinois sont beaucoup moins chers et cela pénalise les producteurs européens. Une mesure qui vise aussi à protéger l’environnement.
L’Europe brûle 130 000 barils d’huiles de cuisson usagées par jour, principalement dans les moteurs des voitures et des camions. La production européenne étant insuffisante face à la demande, 80% de ces huiles sont importées et 60% de ces importations proviennent de Chine.
Après traitement, elles sont alors utilisées comme biocarburant, pour Cian Delaney du collectif d’ONG Transport et Environnement, ces huiles, censées être plus écologiques que l’essence et le diesel, pourraient en réalité être liées à de la déforestation. « Il est très difficile de vérifier s’il s’agit bien d’huiles de cuisson. Et on suspecte fortement qu’une grande partie soit en fait de l’huile de palme. De l’huile vierge, pas du tout utilisée pour la cuisson, et qui entraîne une déforestation massive en Indonésie et en Malaisie », indique-t-il.
Interdiction de l’huile de palme en tant que biocarburant
L’extension des plantations de palmiers à huile sont responsables de 15% de la déforestation en Indonésie entre 1990 et 2008 et 40% de la déforestation en Malaisie entre 1990 et 2015, selon le CIRAD. Un impact reconnu par l’Union européenne qui a décidé de ne plus considérer l’huile de palme comme biocarburant d’ici 2030. « Cette sortie programmée de l’huile de palme a entraîné une baisse de la demande et, en parallèle, une hausse de la demande en huiles de cuisson pour compenser », explique le spécialiste.
Selon un rapport publié par Transport et Environnement, « les capacités de collecte d’huiles de cuisson usagée en Chine correspondent à peu près aux documents d’exportation officiels. Cependant, le pays consomme probablement d’importants volumes d’huiles de cuisson usagées au niveau national, ce qui suscite de fortes suspicions quant à l’utilisation d’huiles végétales vierges faussement étiquetées en tant qu’huiles usagées. »
Renforcer les contrôles
Et la Chine n’est pas le seul pays concerné, « la Malaisie exporte déjà trois fois plus d’huiles de cuissons qu’elle ne peut en collecter, ce qui signifie que la fraude se produit très probablement à grande échelle », le tout poussé par une demande qui explose en Europe et aux États-Unis, qui veulent réduire leur utilisation de carburant d’origine fossile pour coller à leurs engagements climatiques.
Taxer l’importation de cette huile en provenance de Chine est donc un pas dans la bonne direction mais ne suffira pas à lutter contre les fraudes, selon Cian Delaney. « Les systèmes de certifications sont basés sur des déclarations volontaires qui s’appuient sur les documents et la bonne foi des déclarants. Donc, il y a une opportunité majeure pour les fraudeurs de tirer parti du système, dénonce-t-il. Et il n’y a pas assez de tests réalisés sur les produits ni suffisamment d’intervention de la part des douanes ou des agents de la répression des fraudes. »
J. R.