Est-ce la sortie de trop ? Les propos à l’emporte-pièce de Noël Le Graët sur Zinédine Zidane ont suscité une avalanche de réactions indignées. Ces déclarations polémiques du dirigeant breton, âgé de 81 ans, ne pouvaient pas tomber plus mal à l’approche de son audition mardi par la mission d’audit et de contrôle diligentée par le ministère des Sports, pour éclaircir notamment les pratiques managériales de la Fédération française de football (FFF) en matière de violences sexistes et sexuelles.
Le rendez-vous est fixé depuis trois semaines, mais d’un coup, il revêt encore plus d’enjeu. Le 23 décembre dernier, Amélie Oudéa-Castera avait annoncé que Noël Le Graët et sa directrice générale Florence Hardouin seraient entendus dans le cadre de l’audit de la FFF, portant sur les pratiques managériales de l’instance en matière de violences sexistes et sexuelles.
Dans le viseur du ministère des Sports
Le Graët est dans le viseur du ministère des Sports après les révélations de So Foot concernant l’envoi supposé de SMS à caractère sexuel à des employées, et d’accusations de « harcèlement ». Accusations qui ont conduit à la mise en place d’un audit, mais que le président de la Fédération nie farouchement.
C’est ce mardi 10 janvier que le dirigeant doit être entendu. Dix comme Zidane, car c’est l’ancien meneur de jeu des Bleus qui se retrouvera en sous-texte dans cette audition. Les propos du patron de la Fédération, une maladresse selon son entourage, pourraient ne pas jouer en sa faveur, après ses sorties déjà polémiques au sujet du Mondial au Qatar, lorsqu’il s’opposait au port du brassard arc-en-ciel ou lorsqu’il minimisait le sort des travailleurs migrants, créant ainsi de nombreux remous dans le monde du football français. Émoi qui s’illustre aujourd’hui à travers les messages de joueurs et d’anciens joueurs parmi lesquels Kylian Mbappé et Youri Djorkaeff.
Le Graët, un président de la FFF sous haute pression
L’ancien maire de Guingamp, d’habitude peu enclin à l’autocritique, a pris la mesure du tsunami provoqué par son intervention en présentant ses « excuses » personnelles à l’ancien meneur de jeu de l’équipe de France, comme le lui avait réclamé dès dimanche soir la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra. « Je tiens à présenter mes excuses pour ces propos qui ne reflètent absolument pas ma pensée, ni ma considération pour le joueur qu’il était et l’entraîneur qu’il est devenu. Zinédine Zidane sait l’estime immense que je lui porte, comme tous les Français », a-t-il affirmé dans une déclaration à l’AFP.
De Kylian Mbappé, qui a expliqué sur Twitter que l’« on ne manque pas de respect à la légende comme ça », à Youri Djorkaeff, ex-coéquipier de Zidane en bleu, évoquant des phrases « mal placées et malvenues », en passant par le Real Madrid, outré de propos « indignes », Le Graët a fait l’unanimité contre lui.
Quelles conséquences ces déclarations peuvent-elles avoir sur l’avenir du dirigeant, dont l’actuel mandat se terminera fin 2024 ? Techniquement, le pouvoir politique n’a pas la possibilité de destituer le président de la FFF, ce qui provoquerait par ailleurs l’ire de la Fédération internationale de football (Fifa) qui prohibe toute intervention de l’État. Mais il y a un « sentiment de ras-le-bol » au sommet de l’État, explique-t-on dans l’entourage du président de la République, où on déplore « une sensation d’accumulation » de « mots inacceptables ».
La balle est du côté de la FFF et de son comité exécutif, seul habilité à pousser Le Graët vers la sortie. Un membre du Comex, qui a requis l’anonymat, estime que la situation du dirigeant va être intenable. « Il va y avoir une vague de fond terrible, il va devoir s’en aller. La ministre a raison, il est complétement hors-sol. C’est une communication non maîtrisée, mais quand on est président d’une fédération sportive, la plus grande de France, on se maîtrise », a expliqué cette source.
Mohammed Bessaïah