Aux États-Unis, Kamala Harris et son nouveau colistier étaient ce mardi 6 août 2024 en meeting en Pennsylvanie, un état clé pour la présidentielle de novembre. Premier événement de campagne du duo démocrate, quelques heures seulement après que la vice-présidente, en course pour la Maison-Blanche, a annoncé avoir choisi Tim Walz comme partenaire. Ce meeting était l’occasion de le faire connaître au grand public.
Tim Walz a été officiellement présenté par Kamala Harris sous les applaudissements et dans une salle archicomble à Philadelphie, ce 6 août 2024. Les deux ont tenté de capitaliser sur l’enthousiasme et le nouveau souffle provoqué par la candidature de Kamala Harris. Pour leur première apparition publique, la vice-présidente a consacré une grande partie de son discours à la vie et la carrière de son partenaire politique dont elle met particulièrement en avant le profil « Monsieur tout le monde . « C’est un mari, un papa. Pour ses anciens élèves de lycée, il est Monsieur Walz. C’est un patriote, un enfant des grandes plaines du Nebraska qui a grandi dans une ferme », a déclaré Kamala Harris.
Pour le camp démocrate, la soirée a été un carton plein, signe pour eux que l’engouement observé depuis le début de la campagne de Kamala Harris ne faiblit pas. Et ils comptent bien surfer sur cette vague notamment pour faire connaître le colistier de la candidate démocrate. Car Kamala Harris le sait, Tim Walz reste un inconnu pour 70% de citoyens des États-Unis qui disent n’avoir jamais entendu parler de lui.
En meeting, Tim Walz leur a donné un aperçu de sa personnalité : un physique sympathique d’un monsieur tout le monde, un sourire chaleureux, un franc-parler, un humour et une répartie efficace et redoutable. Le sexagénaire est tout de même apparu très à l’aise, fidèle à son franc-parler. Dès ce premier meeting d’ailleurs, il a multiplié les petites piques envers Donald Trump et J.D. Vance, les qualifiant à nouveau de « gens bizarres ». « Ils veulent contrôler les femmes et limiter l’accès à l’avortement », a déclaré Tim Walz avant d’ajouter, « là d’où je viens, on leur dirait : mêlez-vous de vos propres oignons ! ». « Donald Trump ne se bat pas pour vous ou votre famille. Il n’a jamais eu à s’asseoir, comme je l’ai fait, à la table de la cuisine se demandant comment payer les factures. Il s’est assis dans son club de Mar-a-Lago, se demandant comment faire baisser les impôts pour ses amis fortunés. Je dois vous le dire, ces gens font peur et oui, ils sont super bizarres », a-t-il également accusé.
Un colistier complémentaire
Tim Walz et Kamala Harris ont eu droit à une ovation. Il leur reste trois mois pour convaincre les électeurs. Après la Pennsylvanie, Kamala Harris et Tim Walz vont à présent sillonner six autres états clés, à commencer par le Wisconsin dès ce mercredi 7 août, des États dans lesquels le profil du colistier démocrate doit permettre d’attirer l’électorat blanc rural.
En désignant Tim Walz, la candidate à la Maison-Blanche s’est choisi un colistier complémentaire, censé compenser ses points faibles. « Kamala Harris correspond à une Amérique urbaine, californienne, très à gauche. Lui vient d’un monde rural, il était enseignant, il poste des vidéos sur X pour expliquer comment réparer sa tondeuse, mais il a en même temps un projet politique assez à gauche, ce qui peut rassurer l’aile gauche du parti pour cette campagne. Il rééquilibre l’équipe », souligne Fanny Lauby.
Après le retrait de candidature de Joe Biden le 21 juillet, Kamala Harris a eu peu de temps pour faire son choix alors que ce processus de sélection prend en général des mois. La liste des possibles colistiers comportait plusieurs autres hommes blancs, notamment Josh Shapiro, gouverneur de Pennsylvanie et Mark Kelly, ancien astronaute devenu sénateur de l’Arizona.
Tim Walz le choix le moins risqué pour Kamala Harris
La désignation de Tim Walz était la moins risquée, selon Fanny Lauby, les autres candidats ayant des positions plus clivantes sur plusieurs sujets : « Tim Walz ne heurte pas l’équipe démocrate et il est à même de rassurer les centristes, aussi bien chez les démocrates que chez les républicains, fatigués des arguments identitaires brandis par Donald Trump ».
Tim Walz est depuis 2019 gouverneur du Minnesota, dans la région des Grands Lacs, un État démocrate où les électeurs des zones rurales ont largement voté pour Donald Trump. « En tant que gouverneur, entraîneur, enseignant et vétéran, Tim Walz a défendu les intérêts des familles de travailleurs comme la sienne », a fait valoir Kamala Harris.
Vu comme plutôt modéré, le candidat à la vice-présidence des États-Unis a aussi pris des mesures étiquetées progressistes, comme la légalisation de l’usage récréatif de la marijuana ou l’instauration de repas gratuits dans les cantines scolaires. Il est membre du Parti démocrate-paysan-ouvrier. Les démocrates louent son bilan en matière de protection du droit à l’avortement.
Après l’arrêt de la Cour suprême de juin 2022, annulant la protection constitutionnelle de l’IVG, il s’est engagé à faire de son État un sanctuaire pour les femmes cherchant à avorter. En mars 2024, il a participé au premier déplacement d’une vice-présidente dans une clinique prodiguant des avortements, Kamala Harris.
Le camp Trump qualifie Walz de dangereux gauchiste
Si le choix de Kamala Harris pour Tim Walz a été salué dans le camp démocrate, côté républicain, cela suscite de nombreuses critiques. L’équipe de campagne de Donald Trump a déjà qualifié Tim Walz de « dangereux gauchiste extrémiste » et ses partisans lancent les premières piques. L’ancien président Donald Trump parle du « pire futur vice-président de l’histoire » et prévient que si Tim Walz arrive à la Maison Blanche, il va « déchaîner l’enfer sur terre ».
Ces attaques sont également répétées par le colistier de Donald Trump. J.D. Vance était lui aussi en déplacement à Philadelphie comme Kamala Harris et Tim Walz. « Le bilan de Tim Walz comme gouverneur est une blague » a déclaré J.D. Vance.
Un an après son accession au poste de gouverneur du Minnesota, Tim Walz a été confronté à deux crises : la pandémie de Covid-19 et la mort de l’Afro-Américain George Floyd, sous le genou d’un policier blanc. Minneapolis, la plus grande ville de l’État, s’embrase. C’est le point de départ d’un immense mouvement de manifestations anti-racistes qui secoue l’Amérique durant de longs mois. « C’est un extrémiste de la gauche radicale qui a laissé brûler Minneapolis en 2020 » a ajouté le colistier de Donald Trump, en référence aux manifestations.
À peine la décision de Kamala Harris rendue publique, les images des émeutes de 2020 ont réapparu sur les réseaux sociaux. Cet épisode peut être exploité par le camp de Donald Trump qui accuse le gouverneur d’être trop laxiste dans sa gestion de la criminalité : « cela correspond à l’image que les républicains aiment montrer des démocrates, c’est-à-dire un parti faible qui ne sait pas répondre à la violence et en particulier à la violence urbaine », note Fanny Lauby, rappelant qu’à l’époque Tim Walz avait hésité à envoyer la Garde nationale contre les manifestants.
De tout cela, on peut imaginer que la stratégie du camp Républicain sera de s’attaquer à Tim Walz pour ses positions progressistes, tout comme ils le font avec Kamala Harris.
M. B.