Les présidents russe Vladimir Poutine et français Emmanuel Macron ont appelé lors d’un entretien téléphonique vendredi à organiser « dans les plus brefs délais » une inspection de la centrale nucléaire ukrainienne de Zaporijjia, cible de bombardements.
Les deux dirigeants ont « relevé l’importance d’envoyer dans les plus brefs délais une mission de l’Agence internationale de l’énergie atomique à la centrale nucléaire, qui pourra évaluer la situation sur place », a indiqué le Kremlin, précisant que l’entretien avait eu lieu à l’initiative d’Emmanuel Macron.
« La partie russe a confirmé être prête à fournir toute l’assistance nécessaire aux inspecteurs de l’Agence » atomique, selon la même source. La présidence française a de son côté déclaré qu’Emmanuel Macron avait « soutenu l’envoi sur place dans les meilleurs délais d’une mission d’experts de l’AIEA, à des conditions agréées par l’Ukraine et les Nations unies ». Les deux présidents doivent se reparler « dans les prochains jours à ce sujet, après échanges des équipes techniques et avant le déploiement de la mission », selon l’Élysée. L’Élysée précise que Vladimir Poutine a accepté que la mission de l’AIEA « passe par l’Ukraine ».
Crainte d’une catastrophe majeure
Lors de cet entretien, Vladimir Poutine a en outre « souligné que le bombardement systématique […] du territoire de la centrale nucléaire de Zaporijjia crée un danger de catastrophe de grande envergure qui pourrait conduire à la contamination radioactive de vastes territoires », d’après le Kremlin.
De son côté, Emmanuel Macron a dit « une nouvelle fois sa préoccupation face aux risques que fait peser la situation à la centrale de Zaporijjia pour la sûreté et la sécurité nucléaire », a indiqué l’Élysée.« Je m’entretenais il y a deux jours avec le président Zelensky et ce matin-même avec le président Poutine pour chercher à obtenir les indispensables engagements permettant d’assurer la sécurité en matière nucléaire », a ensuite déclaré dans la soirée Emmanuel Macron pour son discours de rentrée à Bormes-les-Mimosas.
Située dans le sud de l’Ukraine et contrôlée par les forces russes, la centrale de Zaporijjia, la plus grande d’Europe, a été plusieurs fois bombardée ces dernières semaines, Moscou et Kiev s’accusant mutuellement de ces frappes. Cette situation a fait resurgir le spectre d’une catastrophe majeure similaire à celle de Tchernobyl en 1986.
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a demandé vendredi à Moscou de ne pas couper la centrale nucléaire de Zaporijjia du réseau ukrainien, ce que redoutent les autorités de Kiev.
Retour du dialogue entre Macron et Poutine
Vladimir Poutine et Emmanuel Macron ne s’étaient plus appelés depuis le 28 mai. Auparavant, le président français avait eu des entretiens téléphoniques avec Vladimir Poutine début mai, début mars et à cinq reprises en février, en pleine montée des tensions jusqu’à l’offensive du Kremlin en Ukraine, le 24 février. Il s’était aussi rendu en personne à Moscou, le 7 février, pour rencontrer Vladimir Poutine.
Ces multiples contacts ont valu des critiques à Emmanuel Macron, certains lui reprochant d’avoir maintenu des échanges réguliers avec le chef du Kremlin sans parvenir à empêcher le lancement d’une offensive contre l’Ukraine.
Vladimir Poutine et Macron ont aussi discuté d’un accord signé à Istanbul au mois de juillet pour débloquer les exportations de céréales ukrainiennes. Moscou réclame en échange la levée des restrictions sur ses exportations de produits agricoles et d’engrais, touchées par les sanctions occidentales visant la Russie depuis le lancement de son offensive contre l’Ukraine. Le président Poutine a « souligné les obstacles qui demeurent devant les exportations russes, ce qui ne contribue pas à une solution aux problèmes relatifs à la sécurité alimentaire mondiale », selon le Kremlin. La France estime qu’il n’y a « aucun obstacle » aux exportations de biens agricoles russes, a affirmé vendredi l’Élysée.
Emmanuel Macron condamne « l’attaque brutale » de la Russie
Dans son discours à Borme-les-Mimosas, Emmanuel Macron a affiché sa condamnation de ce qu’il a nommé « l’attaque brutale » de la Russie : « La guerre est revenue à quelques heures de nos frontières sur le sol européen […] Les fantômes de l’esprit de revanche, les violations flagrantes de la souveraineté des États, l’intolérable mépris des peuples, la volonté impérialiste resurgissent du passé pour s’imposer dans le quotidien de notre Europe. »
Le président français a aussi évoqué les conséquences d’une guerre en Ukraine qui perdure. « Je pense à notre peuple auquel il faudra de la force d’âme pour regarder en face le temps qui vient, résister aux incertitudes, parfois à la facilité et à l’adversité et, unis, accepter de payer le prix de notre liberté et de nos valeurs », a lancé le chef de l’État. Une manière de dire une nouvelle fois aux Français que les temps qui arrivent risquent d’être difficiles.
M. B.