Il y a 18 ans, disparaissait Yahia Benmabrouk, l’acteur créateur connu sous le célèbre nom d’artiste de « L’apprenti », après une carrière artistique pleine, marquée par son engagement et son militantisme aux formes hautement créatives qui lui ont valu d’être immortalisé dans l’histoire de l’art algérien.
Né à Alger le 30 mars 1928, Yahia Benmabrouk est monté sur scène pour la première fois en 1940 suite à une heureuse coïncidence, où il s’est vu alors appelé à la rescousse par l’homme de théâtre, formateur et responsable de la troupe théâtrale algérienne, Mustapha Kateb, en remplacement d’un jeune comédien.
A l’heure où l’Algérie célèbre le 60e anniversaire du recouvrement de son indépendance, il est important de souligner le parcours militant de cette grande figure du théâtre et du cinéma algérien qui a voué son talent d’artiste au service de la cause nationale et de la culture algérienne.
Victime d’un attentat perpétré en 1956 par des extrémistes français, Yahia Benmabrouk s’est vu contraint d’arrêter ses activités artistiques, pour revenir deux ans plus tard, en 1958 et participer, comme membre fondateur à la création de la troupe artistique du Front de libération nationale dirigée par Mustapha Kateb.
Fondée en Tunisie en 1958, la troupe du FLN s’était fixée pour mission principale de promouvoir la Révolution algérienne à l’étranger, à travers un collectif engagé d’artistes, de créateurs et d’intellectuels dans divers domaines des arts de la scène qui a présenté plusieurs de ses performances dans plusieurs capitales du monde.
Après l’indépendance, Yahia Benmabrouk a eu une activité intense au Théâtre national algérien, enchaînant les rôles dans différentes pièces, à l’instar de la toute première, « Hassan Terro » (1963), puis, « Acteur malgré lui », « Une rose rouge pour moi », « El Ghoula », « Ma yenfaâ ghir essah » ou encore, « Es’Soltane el hayer ».
Le regretté a également joué dans « Les concierges » (1970), aux côtés d’un grand nombre de figures du théâtre algérien, à l’instar des regrettés Sid Ali Kouirat, Fatiha Berber et Ammar Marouf, pour se voir distribué deux ans plus tard, dans « L’homme aux sandales de caoutchouc » de Kateb Yacine, devenant ainsi le comédien incontournable au parcours singulier qu’il continuera d’animer jusqu’en 1983 où il apparaîtra dans « Juha baâ h’marou ».
Grande figure du théâtre postindépendance avec, entre autres, Rouiched, Allel El Mohib, Keltoum, Sid Ali Kouiret, Mustapha Kateb et Farida Saboundji, Yahia Ben Mabrouk avait participé à presque toutes les manifestations théâtrales nationales et prit part à nombre de festivals en Tunisie.
Dans le 7e Art et à la télévision, ses débuts furent en 1967, avec le regretté Hadj Abderrahmane avec qui il avait formé le duo anthologique, « L’inspecteur Tahar et l’Apprenti », gratifiant durant plusieurs années le public de cinéphiles et les téléspectateurs d’une série de films comiques qui connaîtra un grand succès.
Parmi les films les plus célèbres rendus par ce duo, où Yahia Benmabrouk incarne le rôle de « L’Apprenti » (l’inspecteur adjoint) avec son caractère humoristique décalé et spontané, « L’Inspecteur Tahar » (1967) et « Les vacances de l’Inspecteur Tahar » de Moussa Haddad (1972), qui connaitra un franc succès « L’Inspecteur Taher Marque le but » (1975) ou encore « Le chat » (1978).
Yahia Benmabrouk a également été distribué dans de grandes œuvres comme le film historique « Chroniques des années de braise » (1975) de Mohamed Lakhdar Hamina, Palme d’or en 1975 au Festival de Cannes, qui raconte la souffrance des Algériens durant les années 1940 / 1950 et leur condition sociale difficile sous le joug du colonialisme français.
Après la mort de son compagnon Hadj Abderrahmane en 1981, « L’Apprenti » s’était presque totalement retiré de la scène artistique, marquant son retour au cinéma dans « Le Clandestin » (1989) de Benamar Bakhti, qui a remporté un grand succès auprès du public.
Dans les années 1990, le regretté a également participé à un certain nombre d’œuvres cinématographiques et télévisuelles, dont « Cheb » (1991) de Rachid Bouchareb, « Hafila tassir » (1993) et « Les vacances de L’Apprenti » (1999).
Yahia Benmabrouk s’est éteint le 9 octobre 2004, à l’âge de 76 ans.